Du baby-blues aux névroses… et TSPT post-accouchement

De la Globalité de la Naissance

Dossier de l’obstrétrique Editions ElpEa N° 322 – Décembre 2003


 » Dans le phénomène du camp, ce qui a été dynamique dans le système de la destruction, c’est l’absence de soins… « 

                                                                                            Myriam DAVID
Pédopsychiatre-psychanalyste, (et déportée)

Introduction

C’est la première fois dans l’histoire des Sages-Femmes que plus de 2 000 d’entre elles démissionnent de leur poste en moins de deux ans, avec pour certaines, un syndrome dépressif à la clef ou traumatique (TSPT que nous verrons plus loin), tel que l’inhibition dûe au stress :  » Je ne peux plus faire d’accouchements « . Malgré une recherche mise en place par le Conseil de l’Ordre, cette fuite est difficile à évaluer. En effet certaines quitteraient la profession et ne répondent pas à l’enquête d’évaluation…
C’est la première fois depuis la création des hospices destinés aux indigents, qu’on concentre des parturientes dans d’énormes structures où l’agitation et la surcharge de travail des soignants évoque plus l’urgence des hôpitaux de guerre, qu’un service de maternité, ce qui a inspiré la citation d’introduction.
Mais c’est aussi, en ces temps de technicité, la première fois, qu’une commission de périnatalité mandatée par le ministre de la Santé et composée de deux néonatologues et d’un gynéco obstétricien, prend en compte toute forme d’insécurité et ses conséquences sur le lien mère-enfant, et la pathologie. La commission propose  » Un suivi personnalisé allant de la déclaration de grossesse à l’issue de l’allaitement « . Plus loin, je cite : « la naissance n’est pas seulement un acte médical mais un acte psycho-affectif majeur dans la vie d’une femme, et ce paramètre essentiel souvent oublié a une incidence primordiale dans le bon déroulement de la grossesse et de la naissance « … La commission propose de différencier le caractère  » à haut risque ou à bas risque obstétrical permettant aux patientes à bas risque de choisir un mode de prise en charge sans l’intervention systématique de techniques de surveillance non nécessaires… et d’établir ainsi pour elle, un véritable projet de suivi de grossesse et d’accouchement… Dans ce cadre l’entretien du 4ème mois, de préférence par une sage-femme, devrait permettre de dépister toute forme d’insécurité pouvant entraîner des complications sur la constitution du lien mère-enfant, ainsi que sur des pathologies de la grossesse. »
     C’est peut-être la première fois en démocratie que la réponse politique ne s’est pas fait attendre, hors toute négociation possible, mais du côté Sage-Femme et du côté politique les bonnes volontés se lèvent, (et j’invite mes consœurs à visiter le site du Conseil de l’Ordre et de la coordination pour être tenues au courant des discussions en cours)… Nous vivons certainement un temps crucial pour la profession.
Pour ma part ce sera aussi la première fois que je traiterai de pathologie, alors qu’en 16 ans de travail préventif auprès de 6 000 mères, je n’en ai jamais eu, à part trois cas de névroses du post-partum dues à l’hypermédicalisation. C’est à partir d’elles que j’ai appris à affiner mes interrogatoires (ou anamnèses) et à introduire en préparation, beaucoup plus la compréhension des mécanismes psychiques en cause pendant l’accouchement, et leur interaction avec les  » nouvelles conduites obstétricales ». C’est ce qui a évité certains pièges et réduit pratiquement à zéro (je n’en ai plus eu) le risque de traumatisme. C’est ainsi que la méthode de Préparation Globale est devenue aussi méthode de prévention des névroses du post-partum.

Quelques rappels et précisions

Il est peut-être utile pour ceux et celles qui ne m’auraient jamais lue (1) d’expliquer la motivation de ma recherche.
Une première expérience de psychomotricienne m’avait fait constater la fréquence de naissances difficiles chez les enfants en difficulté.
En reprenant mes études pour devenir sage-femme, mon but était très clair : agir en amont. Pour cela il fallait comprendre ce qui dans l’obstétrique pouvait être travaillé pour que l’accouchement difficile ne soit plus une fatalité. Il fallait non seulement favoriser l’eutocie mais encore améliorer celle-ci : faire en sorte qu’un accouchement eutocique médicalement ne soit pas  » traumatisant  » pour la mère, parce que vécu  » trop long ou trop violent  » par elle.
Je savais que ce traumatisme pouvait avoir des conséquences dommageables, car il pouvait conditionner sa relation à son enfant et par-là même la vie d’adulte de celui-ci.
J’ignorais que ma démarche allait m’emmener en expérimentateur sur le versant psychique de l’accouchement. Des études de Sophrologie Médicale jointes à ce qui allait devenir un long travail psychanalytique, m’ont permis de mettre des mots sur ce que je vivais dans mon expérimentation intensive sur le terrain. L’écoute de milliers de femmes tant en préparation qu’en salle m’a permis de comprendre qu’au-delà de la clinique et interagissant sur elle, il y avait un grand passage psychique, dont l’accouchement était en fait… la somatisation.
Si les modalités n’en étaient pas respectées, une mère pouvait en rester traumatisée au point de ne pouvoir établir la relation à son enfant. Tout dépendait en fait de son histoire à elle, et de la façon dont on la laissait vivre son accouchement, à son rythme ou pas. Ce sont ces modalités, ces  » lois  » que nous allons revoir brièvement, car je les ai déjà longuement décrites(1a). Elles sont à la base de la méthodologie de la Préparation Globale.
C’est cette compréhension, jointe aux études citées dans les articles, qui m’avait permis déjà en 2000 de lancer un cri d’alarme :  » en surmédicalisant, les connaissances actuelles montrent que nous faisons de la mère et de l’enfant des individus à risque psychique « .
Nous traiterons ensuite du sujet de l’article : les pathologies psychiques du post-partum.
Nous verrons tout d’abord le classique baby-blues puis les  » névroses post-traumatiques post-accouchement « , pratiquement toujours associées à une difficulté d’attachement à l’enfant : quatre cas cliniques aideront à la compréhension des facteurs traumatiques.
Nous aborderons enfin les  » TSPT  » (troubles du stress post-traumatique), analogues aux traumas consécutifs à une guerre ou un attentat.
J’en donnerai quelques cas cliniques et émettrai certaines hypothèses car ils demandent un champ d’investigation. Dans les T.S.P.T, il y a attachement à l’enfant, en tous cas lien, mais un très grave traumatisme pour la mère qui peut demander – si elle arrive à remettre une grossesse en route – une césarienne d’évitement.
Ils commencent à apparaître dans la littérature et sont du ressort d’une psychologie  » spécialisée « .
En effet je suis plus inquiète que réjouie de l’arrivée actuelle (et prévisible) des  » psy  » en maternité (psychiatres adultes et psychologues cliniciens). En fait la majorité d’entre eux est formée en psychopathologie clinique. Or la grossesse psychique n’est pas une maladie. Daniel STERN (2) nous dit :  » La configuration psychique maternelle ne ressemble à aucune autre configuration psychique existante « . Le risque est la psychiatrisation de femmes normales, vivant une crise en pré ou post-partum, en relation avec leur histoire et/ou majorée peut-être par un suivi trop invasif, ou au contraire un manque d’écoute… Aussi faut-il avoir compris tout cela pour apporter une aide efficace.
Mais les congrès sur la grossesse psychique commencent à apparaître, donc il y a de l’espoir bien qu’une formation ne se fasse pas en un congrès.
Les psy connaissant la grossesse psychique et surtout sa finalité(je cite leurs travaux) sont encore en minorité.

A – Le Grand Passage  » Psycho-affectif « 

     1 – La grossesse psychique

C’est un état transitoire caractérisé par la  » transparence psychique  » : les contenus de l’inconscient faisant irruption dans le conscient. Ces contenus sont les modèles éducationnels de l’enfance ou  » patterns « . Je cite souvent Monique BYDLOWSKI :  » l’enfant devient alors enfant de leur propre enfance  » (3)
Passer de l’état de fille de ses parents à celui de parent de son enfant semble une évidence, c ‘est une loi incontournable !!!…
Mais pour l’inconscient, il s’agit d’une véritable pirouette que d’inverser les rôles, d’où la transparence psychique, qui amène à un grand remaniement et qui peut même passer par un état de crise.
 » Normalement la femme atteint un stade pendant lequel elle est le bébé et le bébé est elle. Cela n’a rien de mystérieux, après tout elle aussi a été un bébé. Elle se souvient également des soins qu’on lui a donnés et ces souvenirs constituent une aide… ou un obstacle !  » Nous dit Winnicott qui l’avait si remarquablement compris.(4)
Ce travail psychique va aussi dépendre du positionnement inconscient de la petite fille, face à ses  » patterns « , et du positionnement plus ou moins conscient de la future mère.
C’est ainsi qu’il peut y avoir réparation, opposition, innovation, ou le plus confortable : répétition. Mais le travail de la grossesse peut être aussi de chercher son positionnement : ce sont ces jeunes femmes anxieuses, qui ont perdu leurs repères, qui sont isolées et manifestement en quête d’identité.
Si on se réfère à la littérature, la psychanalyste Bergeret AMSELECK (5) emprunte au psychiatre psychanalyste(et précurseur) RACAMIER le terme de maternalité (condensation de maternel, maternité et natalité).  » La maternalité est une période privilégiée car favorisant le vécu de chocs anciens et permettant à celle qui la vit de se soigner. Cette crise peut être organisatrice pour le psychisme à condition d’être accompagnée, développée et contenue… C’est la période la plus dangereuse pour l’identité « .
 » C’est donc une histoire de filiation ?  » me disait récemment une jeune mère.
 » Si l’on considère que les saumons remontent les rivières pour frayer là où ils sont nés, on peut dire cela du psychisme humain maternel, la différence notable étant qu’il s’agit d’une transformation à partir de la source !  »
Ce qui est très intéressant et abonde dans le sens de l’importance des  » patterns  » est le positionnement observé chez mes patientes  » adoptées  » et reproduisant le mode d’accouchement de leur famille (d’adoption). Or, dans ce cas la mère n’a pas accouché physiquement mais psychiquement. Je pense à Francine (et bien d’autres) accouchant par le siège, comme étaient nées sa mère et sa grand-mère !…
En substance le travail d’élaboration passe par le questionnement plus ou moins inconscient de la préoccupation maternelle primaire (4) : « Suis-je moi, capable de faire un enfant normal, suis-je capable d’accoucher, suis-je capable d’être mère ? »
Mon travail de prévention m’a appris que la résolution de la crise passait par l’attachement progressif au bébé.
Mais notre surveillance médicale invasive, systématisée, axée sur la surveillance de la pathologie tant fœtale que maternelle répond par : « Non » à tout ce questionnement.
D’où l’inquiétude grandissante des mères, leur mal-être, leur démotivation… et l’apparition de pathologies grandissantes, telles les MAP…
Et le discours social négatif aggrave encore ce processus.

     2 – L’accouchement : le passage somato-psychique

Le questionnement de la grossesse : « Suis-je capable ? » va être expérimenté par la mère au cours de l’accouchement. C’est la bonne conduite de ce dernier, selon ses modalités à elle, qui va le lui prouver.
C’est cela que les femmes instinctives qui veulent « sentir », souhaitent expérimenter.
Et c’est pour cela qu’un accouchement apparemment « normal » peut ne pas l’être pour la mère, si quelque chose du passé s’est reproduit la renvoyant vers les conditionnements de l’enfance plutôt que vers son nouveau rôle de mère.
Du côté de la psychanalyse (5) :  » l’accouchement contient en condensé pourrait-on dire toute la maternalité qui se met en acte, qui se dramatise à travers le corps.  »
Sur le terrain, pendant mes gardes, j’ai pu observer, à certaines étapes de la dilatation, des réminiscences spontanées d’évènements marquants de l’enfance. Je les ai citées dans l’article sur l’accouchement (1b).
J’ai compris peu à peu qu’aider les femmes à s’exprimer, à donner un sens les amenait à se positionner dans le présent : « Moi avec mon enfant je ferai ceci… ou cela… » Et la dilatation s’accélérait. Cela devint une pratique courante pour moi, amenant ainsi à ma conscience l’hypothèse du double travail physique et psychique de l’accouchement. Lever une stagnation de la dilatation pouvant se faire par une prise de conscience. J’ai pu voir ainsi au cours du travail des allers et retours rapides entre le Moi/enfant et le Moi/maman.
Alors dans mon travail de prévention, j’ai compris qu’il fallait mettre l’attachement en place avant l’accouchement : c’est cela qui rendait les dilatations plus faciles et rapides, et agissait considérablement sur l’intensité algique.
Mais l’attachement n’est pas toujours facile : c’est le fruit d’un « travail » qui permet de lever les barrages émotionnels.
La méthodologie des techniques sophroniques de la PG suit le processus naturel de l’attachement, et surtout permet aux mères de le mettre en place à leur propre rythme…

B – Les difficultés du passage en post-partum

     1 – Le baby-blues

C’est en fait le passage psychique décalé par rapport à l’accouchement physique, c’est donc un état « normal » bien qu’anxiogène.
Les sages-femmes le connaissent bien, et il peut être aussi déclenché selon chaque femme par la notion de « ventre vide » (la fin de la complétude ou fusion) l’enfant réel différent de l’enfant imaginaire, l’ictère du bébé, la fatigue du manque de sommeil, ou l’ingérence des visites. Celles-ci viennent s’immiscer dans cette délicate relation nouvelle-née où la mère fait son apprentissage. Les ingérences de toutes sortes bloquent dans certains cas, l’accès à « l’instinct » permettant les gestes justes et la réponse positive au questionnement : « Suis-je capable d’être mère ? »
Cet état dépressif transitoire peut durer 24 heures et nous avons toujours su le gérer en rassurant les mères et en leur permettant une grande nuit de sommeil réparateur…
Qu’en est-il des sorties précoces ? Arrivent-elles au bout de leur baby blues ?… Celui-ci peut d’ailleurs réapparaître de façon transitoire au cours du 1er mois.
Le grand étonnement des sages-femmes travaillant en PG est l’absence de baby-blues. Je l’avais moi aussi constaté. Les femmes faisant leur passage psychique (l’attachement au bébé) avant l’accouchement n’ont pas à le faire après !…
Il s’agirait donc bien de cela.
Rappelons-nous les confidences de nos accouchées en  » baby-blues  » : « Je n’arrive pas à réaliser… qu’il est à moi ?… ». C’est souvent cet état, si douloureux qu’il soit qui permet à celles qui n’ont pas fait leur passage, l’intégration de leur nouvelle fonction.

     2 – Les névroses post traumatiques post accouchement

Déjà décrites en 1978 par Monique BYDLOWSKI (6).
C’est en fait un état durable qui apparaît après la sortie précoce, qui est identifié parfois par une sage-femme chargée de la rééducation périnéale, ou qui est « endormi » au PROZAC par le médecin généraliste. Il n’y a donc pas d’élaboration psychique (compréhension) pour les mères d’où angoisse, et selon les cas, délégation du rôle de parental au pédiatre, à la crèche etc…
Que dit la littérature ? Le Dr CANON-YANNOTTI (7) nous livre son expérience d’analyste dans une maternité. Elle parle des névroses traumatiques qu’elle a eu à traiter chez certaines « périduralisées » : « Ce sont des souvenirs de l’accouchement qui ne se refoulent pas ou ne se mettent pas à distance après deux ou trois jours de suites de couches… Ces névroses viennent des modifications de l’organisme et des actes obstétricaux perçus avec effroi parce que ces femmes n’étaient pas prêtes à devenir mères »… Je pense quant à moi à certains accouchements violents, actuellement, notamment au grand pourcentage de déclenchements, d’extractions instrumentales, violence « autorisée » parce qu’on pense qu’avec la péridurale la mère ne sent rien !…
Comment devenir parent quand les soignants rejouent le rôle parental en décidant, déclenchant, « extrayant » ?… Aider au passage n’est pas interférer…
Si la mère dans son histoire a eu ce genre de parents elle est plutôt précipitée vers le passé (le Moi petite fille) que vers le présent (le Moi/Maman). D’où l’impossibilité d’entrer dans son nouveau rôle… et la dépression s’installe.
Mais comment faire quand on est sage –femme dans d’énormes structures et qu’il faut « vider » les salles rapidement ?… Je ne vois pas dans l’immédiat de solution, si ce n’est la prévention… En attendant d’éventuelles évaluations du risque actuellement encouru par les femmes… Et les enfants.

Cas cliniques de névroses

Ce qui caractérise les névroses est aussi la grande difficulté d’attachement. Elle est bien sûr à différencier de la terrible psychose puerpérale qui parle en elle-même du grand passage psychique. Dans cette psychose les mères sont « hors du réel », délirantes, voire dangereuses pour l’enfant. Dans la névrose les mères décrivent parfaitement leur mal-être sans en connaître la cause : « J’ai l’impression… que le bébé n’est pas à moi ! « .
Je vais reprendre deux des cas cités dans un de mes articles (1b). J’en rajouterai deux autres récents rencontrés par les sages-femmes formées en PG.

Cas n°1

J’ai retrouvé Christine prostrée, quelques heures après l’accouchement, me disant :  » je vis l’horreur « . Elle raconte son arrivée de nuit dans un service surchargé, et les  » reproches  » (ou vécus comme tels) de la sage-femme lui disant :  » Vous auriez pu attendre ! « . Elle était à dilatation complète et évoque sa sensation d’avoir été  » bloquée  » par cette phrase, paniquée au point qu’un médecin est venu (sans explication) mettre en place une extraction instrumentale : elle ne pouvait plus pousser : « et là, j’ai plongé dans l’horreur « .
Nous ferons vite le lien entre son enfance (reproche de la mère, brutalité du père alcoolique précipitant le soir sans explication ses enfants dans la cave), et son accouchement.
 » Pourquoi n’en avoir pas parlé pendant la préparation ?
J’ai voulu oublier, me dit-elle. Cela fait vingt ans que je n’ai plus vu mes parents « .
Il faudra deux heures pour que Christine sorte de sa prostration et puisse prendre son bébé (qu’elle avait rejeté comme elle avait rejeté ses parents). Elle sera suivie dès sa sortie par un réseau nouvellement créé, après l’apparition des premiers cas de névrose dans mon secteur.

Cas n°2

Un appel inquiétant à 8 heures du matin :  » bonjour c’est Marie-Ange, je viens de rentrer chez moi mais je ne peux pas m’occuper du bébé : j’ai peur de lui faire mal. Je ne peux pas rester seule avec lui, du coup c’est ma mère qui s’en occupe  » !
Elle raconte la triade classique d’un grand Centre Hospitalier : déclenchement – péridurale – forceps.
 » Ils disent que ça s’est bien passé, que le bébé a repris du poids, mais moi je vais très mal « .
Le réseau n’allant pas géographiquement jusqu’à son secteur : je lui demande de venir avec son bébé (une petite fille) et le mari si possible plutôt que la mère …je la trouve agitée,  » obnubilée  » par le bébé qu’elle regarde fréquemment… L’entretien met à jour sa relation à « sa mère-qui-ne-la-quitte-pas  » depuis qu’elle a divorcé de son père.
 » cela vous pèse ?
je rentre ma colère… elle veut tout faire pour moi !
Et votre petite fille ? à part cette peur, que ressentez-vous ? y a t-il un sentiment ?
c’est la colère qui vient, à cause de l’accouchement : eux ils disent que ça s’est bien passé ! moi j’ai         l’impression qu’ils me l’ont arrachée !… Moi je ne voulais pas être déclenchée, mais eux ils disaient que ça         m’aiderait  » !

Il faudra un moment pour qu’elle trouve l’association entre la colère non exprimée en tant que fille de sa mère, et la colère vécue en devenant mère de sa fille… Il a fallu des techniques thérapeutiques très puissantes (en sophrothérapie) pour que Marie-Ange investisse son bébé.
Un pédopsychiatre de son secteur a ensuite assuré le suivi.

Les facteurs traumatisants

Pour ces deux cas il y a de toute évidence manque d’accompagnement et/ou ingérence.
Tout aurait pu changer pour Christine si la sage-femme avait engagé le dialogue et/ou le médecin expliqué son geste.
Pour Marie-Ange c’est différent. Pour devenir mère, je l’ai déjà expliqué (1a) la fille a besoin de se « séparer » de sa mère, de faire elle-même son nid, symboliquement. Or ce mouvement instinctif était contrarié par-la-mère-qui-faisait-tout-pour-elle ! Ce qui a été traumatisant, c’est que la maternité a reproduit en déclenchant (ça va vous aider) tout en banalisant (ça s’est bien passé), ce qui est une non-reconnaissance. Dans l’incapacité d’agir par elle-même, sa colère refoulée contre sa mère et réactivée par l’accouchement était maintenant détournée sur l’enjeu de toutes ses frustrations : l’enfant.
La banalisation devient aussi dangereuse que la systématisation de l’hypermédicalisation.

Cas n°3

Rencontré par une sage-femme libérale dans la région Sud aux abords d’une grande structure.
Elle accueille en rééducation, Aurélie, qui a un petit garçon de dix mois. Celle-ci dit qu’elle pleure beaucoup : elle n’arrive pas à dépasser une césarienne décidée en cours de travail, elle se raccroche à l’allaitement pour sentir que son bébé est à elle parce que dit-elle  » en dehors de cela je ne sens pas que c’est le mien « . Elle n’est pas à l’aise avec l’enfant :
« Je ne comprends pas… La grossesse s’est bien passée… mon gynéco m’a dit que j’avais un bassin très large,          que tout irait bien. Effectivement l’accouchement se passait bien quand le gynéco de garde a décidé          brutalement à 19 heures de césariser, disant que ça ne passerait pas… J’étais à 6 cm, le bébé allait bien, je ne          comprends pas !…
La sage-femme ne note rien de particulier dans l’histoire de cette femme qu’en fait elle ne voit que pour la première fois. Elle interroge :
 » Y a-t-il un évènement incontrôlable pour vous qui vous serait arrivé de cette façon, brutalement ?
… Oui ;;; mon père a quitté ma mère au début de ma grossesse. Rien ne pouvait laisser prévoir cela !… Il est           revenu depuis mais… ça a été difficile !
N’y aurait-il pas une similitude dans le côté « imprévu » des deux évènements ?… Et ce sont des évènements très         importants, puisqu’il s’agit de votre père et de votre fils ?…
La sage-femme n’ira pas plus loin ce jour là mais notera une amélioration de l’état de cette patiente, avant de pouvoir appliquer le protocole de traitement de névroses mis au point en sophrothérapie, et à la fin du passage psychique, le bébé va ramper et monter s’installer sur le ventre de sa mère, comme un nouveau-né !… Dans les jours qui ont suivi, elle a commencé à pouvoir se séparer un peu de lui, et à le confier au jeune papa.

Cas n°4

Recueilli par une sage-femme de la région Sud-Est.
Il s’agit d’une patiente primipare faisant une MAP à 35 S.A. Après une décision d’hospitalisation et de tocolyse le week-end, il y a décision de déclenchement le lundi : Protocole « Rupture – Péri – Synto »… et césarienne. La patiente, Chantal voit passer son bébé « à cheval » dit-elle sur les mains de la sage-femme et le verra partir « lui tournant le dos « , dans une couveuse vers le service de Néo-nat. Elle dit n’avoir jamais vraiment pu s’approcher de lui et avoir découvert son visage huit jours après.
Le bébé a 3 mois, il est très agité et sa mère pleure très fréquemment, visiblement en état de dépression, et très fragilisée.
La sage-femme interroge :
 » Y a-t-il un ou plusieurs éléments qui vous rappellent une situation vécue dans votre enfance ?…
Mes parents se sont séparés deux fois, quand j’avais 3 ans et quand j’avais 5 ans et j’ai l’impression d’avoir été          » abandonnée « … Mais ils sont restés très autoritaires, ils ne me laissent pas… décider ! Même maintenant qu’ils         sont définitivement séparés.  »
Après avoir identifié les deux phénomènes de reproduction : l’autorité et l’abandon, Chantal se sentit mieux mais il fallut rapidement appliquer le protocole en sophrothérapie pour permettre en fait le passage psychique, qui n’avait pas été fait.
Dans ces cas là c’est une question d’urgence pour la mère comme pour l’enfant.

Facteurs traumatisants

Pour Aurélie, sans dossier médical on ne peut pas savoir si la césarienne a été abusive ou pas. Dans tous les traumatismes que je suis amenée à traiter en ce moment, ressort le sentiment d’avoir été négligée, ou contrainte…
Dans ce cas, on peut noter la coïncidence entre la séparation brutale d’avec le père et la fin brutale de la fusion mère/bébé (la césarienne) alors que dans les deux cas « tout allait bien. » Si le gynéco avait pris le temps d’expliquer, de préparer en somme, en accompagnant son geste il n’y aurait peut-être pas eu de névrose car pas de répétition. Pour Chantal on tombe pile dans « l’absence de soin psychique ». Indépendamment des conduites obstétricales discordantes, on ne lui montre pas l’enfant et celui-ci reproduit une attitude parentale abandonnante : il lui tourne le dos. Il aurait suffi qu’on lui explique, qu’on lui présente l’enfant, qu’on l’accompagne, pour que malgré la prématurité et les circonstances de déclenchement, elle puisse mettre en place plus facilement son Devenir Mère.

3 – les T.S.P.T (ou troubles du stress post-traumatique)

Ils commencent à apparaître dans la littérature.
Dans les cas que j’ai pu rencontrer, la différence notable avec les névroses, c’est qu’il y a malgré les difficultés, attachement à l’enfant mais… la relation peut être anxieuse voire pour certaines le bébé peut être vécu en danger mais j’insiste : il y a attachement.
Le Dr REYNOLDS (7) professeur d’université et Chef du Département de « Family Medecine » à Londres nous en parle : « c’est une expérience traumatique de la naissance entraînée par un traumatisme vécu antérieurement ». Il conclut en insistant sur l’importance de noter les antécédents « médicaux » avec soins pour déterminer si une femme a été victime d’un traumatisme pouvant entraîner un accouchement traumatisant. Il insiste sur la nécessité de prise en charge et notamment de la douleur, et après l’accouchement de soins attentifs qui incluent la compréhension de l’expérience vécue par la femme. Il conclut ainsi :  » Des recherches beaucoup plus poussées s’imposent dans ce domaine « .
La psychiatre Aurore SABOURAUD-SEGUIN, de l’Institut de Victimologie de Paris (9) décrit le T.S.P.T :
1) Le sujet a subi une expérience qui a menacé sa vie, il a été exposé à un événement traumatique pendant           lequel son intégrité physique a été menacée ou il a été témoin d’un événement au cours duquel des individus           ont pu être menacés de mort ou grièvement blessés.
2) La réaction du sujet s ‘est traduite par une peur immense, un sentiment d’impuissance et d’horreur.

Le sujet revit cette expérience en permanence de différentes façons :

1 – Reviviscence de souvenirs envahissants : images, pensées ou perceptions.
2 – Rêves répétitifs provoquant un sentiment de détresse évoquant l’agent stressant.
3 – Impression imminente de danger,  » comme si cela allait se reproduire »…
4 – Sentiment de détresse psychique lors d’indices évoquant l’agent stressant.
5 – Réactivation physiologique face à un aspect de l’événement en cause.

L’auteur fait la différence entre les traumatismes dûs aux humains (guerre,
attentats) et ceux qui sont dûs aux catastrophes naturelles. Les psychiatres de l’armée et les urgentistes connaissent bien ce phénomène…
Ce qui est important à signaler dans les T.S.P.T c’est qu’il n’y a pas
d’antécédents personnels particuliers. Cela peut arriver à tout le monde, face à des chocs violents et brutaux.
Dans mon exercice clinique j’ai rencontré onze cas de T.S.P.T, mais dont neuf étaient
effectivement directement liés à une catastrophe naturelle ou une guerre.
Lors des inondations de Vaison-la-Romaine, huit futures mères entre 32 et 36 S.A,
avaient perdu leur mère et/ou une partie de leur famille, et bien sûr tous leurs biens. Les équipes de déchoquage ne les avait que très peu vues en raison de leur état…
Je les ai réunies dans un grand groupe de travail, solidaire… J’ai pu effectivement constater chez ces femmes tous les signes cités plus hauts… Récits, pleurs sur ceux qui ne sont plus, et sur les violences subies… et biens sûr de ma part beaucoup de travail en sophrothérapie… Peut-être le bébé qu’elles portaient les a aidé car peu à peu elles se sont données « l’autorisation » de communiquer avec lui sans trop grande culpabilité : Elles n’avaient pas le temps nécessaire pour amorcer leur travail de deuil et dépasser le sentiment d’horreur de ceux qui ont tout perdu. Il a fallu tout un réseau de soins pour rétablir le sommeil, stopper les cauchemars…
Quatre seulement d’entre elles (des primipares) ont pu accoucher par voie basse. Les autres ont dû être césarisées. Mais l’attachement en suite de couches était bien là et les bébés calmes.
J’allais rencontrer quelques années plus tard un T.S.P.T post-accouchement, il s’agissait d’une future mère rescapée de la guerre récente dans son pays. Elle aussi décrivait des cauchemars répétitifs, de scènes réellement vécues…
L’attachement à son bébé allait peu à peu l’aider à dépasser ces symptômes.
Le jour de l’accouchement la dilatation s’est bien passée mais au moment de la poussée la sage-femme l’a obligée à pousser, alors que dit-elle, « il lui aurait fallu plus de temps »… Il y eut expression utérine et quinze jours après l’accouchement, elle revécut, en plein jour, au moment où elle s’y attendait le moins, des scènes entières de guerre : « C’étaient des déferlantes de vrais films qui passaient devant mes yeux… j’ai même pensé au suicide. »
Cet état allait durer près de deux mois.
En l’écoutant, quelques années après j’associais l’expression utérine : on l’a contrainte, avec l’oppression subie par elle, et les siens, dans son pays.
La question que je me pose est la suivante : N’y a-t-il pas dans les T.S.P.T post-accouchement, contrairement semble-t-il à la définition des autres, l’intervention d’antécédents de danger imminent, voire vécus, qui ressurgiraient lors des circonstances de l’accouchement faisant ressurgir ce même ressenti ?

Une sage-femme vient de me signaler deux autres cas, encore différents : ils montrent à quel point les T.S.P.T doivent être diagnostiqués d’une façon très précise. Nous en avons besoin.
Il s’agit de deux femmes s’étant vécues « prisonnières » pendant leur accouchement, long d’ailleurs, et qui s’est terminé pour les deux en OS et extraction instrumentale.
On ne note pas d’antécédent particulier au niveau des patterns.
Mais – et c’est là que c’est troublant – elles ont eu toutes les deux leur grand-père (le père de leur père) prisonnier pendant la guerre en  » camp de concentration « … L’une est encore choquée et ne veut pas témoigner, l’autre décrit : « je suis restée dans une chambre sans fenêtre, sombre, qui m’a donné des idées noires : « ça va jamais finir »… j’ai faim… j’ai soif… il y a une porte vitrée qui donne sur le couloir : je vois passer des ombres… c’est étouffant… angoissant… la salle est moche… morbide ».
Sujet infiniment délicat… et à explorer. Il faut être très prudent.
Forte de cette expérience, la sage-femme en question a introduit depuis dans son anamnèse : « avez-vous dans votre famille des traumatismes liés à la guerre ? »
Au sujet des enfants des survivants de camps de concentration, Aurore SABOURAUD parle de troubles psychologiques :  » Les enfants de ces victimes peuvent témoigner de la destruction qui a été opérée et en souffrent à leur tour « . Les deux patientes avaient entendu dans leur enfance les récits du vécu terrible de leur grand-père…
Les circonstances de l’accouchement les ont peut-être amenées à associer celui-ci au danger de mort du camp…
Ce que je peux affirmer sans crainte de me tromper est que l’accouchement est un très grand passage somato-psychique. Il pourrait favoriser l’émergence de situations inscrites dans la mémoire transgénérationnelle… Mais celle-ci n’est pas encore reconnue scientifiquement.
L’inconscient en effet associe la « séparation » avec le bébé (l’accouchement) avec celle des disparus (c’est cela l’aller-retour vie-mort qui peut aussi être  » interpellé « ) et cela bien sûr en fonction de l’histoire des mères. J’ai souvent observé ce mécanisme, après l’expérience de VAISON.
Je pense, dans un autre registre, également aux agressions sexuelles subies dans l’enfance, et qui se somatisent par des douleurs importantes vaginales et/ou vésicales pendant la dilatation avec souvent une stagnation de celle-ci, ou une peur redoutable de l’expulsion. Là aussi il y a un risque de T.S.P.T.
Dans ce cas il faut absolument parler aux femmes du risque de douleur (ou de peur incontrôlable si elles sont périduralisées) pour qu’elles puissent gérer celles-ci, les comprendre et se situer ainsi dans le présent : il s’agit de la naissance de leur enfant et pas de leur passé.
 » L’accouchement est une porte battante entre le passé et le futur  » remarquait récemment une sage-femme.
Pour conclure sur les T.S.P.T, je ne peux m’empêcher d’associer la souffrance des mères à celle des sages-femmes. En effet, beaucoup m’ont décrit des troubles inhibiteurs à force d’être harcelées, surmenées ou contraintes. En les écoutant, elles m’ont fait penser à ces T.S.P.T… C’est peut-être la raison pour laquelle certaines ne donnent plus de nouvelles.

Conclusion… et espoir

Les difficultés de la fonction maternelle (soins et présence psychique à l’enfant) donnent beaucoup de travail aux sages-femmes qui assurent les suites de couches soit en structure, soit à domicile, ou la rééducation périnéale. Aussi si nous admettons l’urgence de ces difficultés, il nous faut pratiquer des techniques d’urgence, par exemple mettre en place l’attachement à l’enfant, bien avant l’accouchement et permettre ainsi le passage psychique… ou alors en structure, même en niveau III faire une anamnèse des  » accouchantes « , les amener à « associer », c’est à dire à identifier certains blocages, être dans la compréhension de ce qui se joue là.
Je souhaite que cet article aide les sages-femmes à une meilleure approche des névroses post-accouchement, les plus fréquentes actuellement, et qui sont l’urgence en ce qui concerne l’enfant, car il y a trouble de l’attachement, voire même absence de celui-ci.
Sans citer vraiment la fameuse étude californienne de 1994, qui associe accouchement difficile et rejet maternel à une augmentation considérable de violence et de crime chez l’enfant devenu adulte (1a), je parlerai de la souffrance de l’enfant.
Le bébé « coupé » de la présence psychique de sa mère vit des états de frayeur intense à un âge où il ne peut pas psychiquement « stocker l’information ». Le risque pour lui est une disproportion de réaction à un traumatisme ultérieur offrant la même intensité d’insécurité.
Sur le site, nous avons concentré toutes les études scientifiques sur les conséquences de stress périnataux. Ils montrent l’importance de la prévention de la pathologie de la grossesse et des troubles relationnels mère-enfant.
La violence, la maltraitance grandissantes, certains bilans départementaux faits sur les acquisitions cognitives des enfants de 3 ans – anormalement insuffisantes – laissent à penser que selon la loi de l’alternance des cycles, une prise de conscience va s’amorcer ?
C’est cela pour moi la lueur d’espoir… associée bien évidemment à tous les retours positifs des sages-femmes travaillant en PG.
Je ne peux pas penser que les conclusions de la commission de périnatalité restent sans écho…

Dernière minute :

A la faveur de cet article une très importante littérature scientifique vient d’être mise à jour, avec notamment des données et des cas cliniques qui méritent une étude plus approfondie dans ce domaine.
Ce sera le sujet du prochain article.

 N.D.A

L’absence de soins psychiques est très difficile à expliquer. Je sais parfaitement que Myriam DAVID parlait des camps de la mort… Mais elle en parlait pour rendre hommage au soin qu’apportent les nurses de LOCSY, ces « artistes au service de l’humanité », dit-elle, car permettant la construction psychique d’enfants sans mère.

Bibliographie

1 – M.H de Valors
Site : nposf.org
a) Le Versant psychique de la Grossesse DO n° 287
b) Le Versant psychique de l’Accouchement DO n° 289
c) La Préparation Globale DO n° 291
d) La Fonction Maternelle en Péril DO n° 310
2 – Pédopsychiatre formation : « La constellation maternelle »
Grenoble – 8 au 10 octobre 2000.
3 – M. BYDLOWSKI  » La dette de vie  » Éditions PUF 1997
4 – D.W. WINNICOT  » Le bébé et sa mère  » ed. Sciences de l’homme PAYOT
5 – C. BERGERET-AMSELEK  » Le mystère des mères » Édition Desclée de Brouwer 1998
6 – M. BYDLOWSKI – RAOUL DUVAL A.  » Un avatar psychique méconnu de la puerpéralité :
la névrose traumatique post-obstétricale « . Perspect Psychiatr 1978;4:321-8
7 – Dr CANON-YANOTTI « Que signifie la douleur de l’accouchement »
Acte du congrès Sages-Femmes International 1995
8 – Internet – Post TRAUMATIC STRESS DISORDER CHILDBIRTH : THE PHENOMENON
OF TRAUMATIC BIRTH
9 – A. SABOURAUD-SEGUIN  » Revivre après un choc  » ÉDITIONS ODILE JACOB 2001